Comment repérer les personnes fragiles? Comment les aider? A l’occasion des journées nationales de prévention pour le suicide, plusieurs professionnels livrent à L’Express les clés pour accompagner ses proches.
“Bientôt je ne vous embêterai plus”. Une dizaine de mails comme celui-ci tombent chaque jour dans la boîte de l’association SOS Suicide Phénix. Des mots typiques des ados, tandis que les personnes âgées, elles, diront qu’elles ne servent “plus à rien”. Des messages, qui, lorsqu’ils tombent dans l’oreille de l’entourage, ne sont pas toujours pris au sérieux. Pourtant, “nous sommes tous des acteurs de prévention à notre échelle”, insiste Magalie Gavend, psychologue et secrétaire générale de la fédération SOS Suicide Phénix en ces journées nationales de prévention pour le suicide.
Mais comment identifier une personne à risque parmi ses proches, tant le suicide demeure un tabou, dans un pays où le taux de suicide est nettement plus élevé que la moyenne européenne? Les signes sont plus ou moins perceptibles, de celui qui cesse de sourire à un autre qui changera beaucoup plus radicalement de comportement, en s’isolant du jour au lendemain par exemple. La personne en proie à des idées noires peut souffrir de troubles du sommeil, d’angoisse, de perte d’intérêt… Des symptômes semblables à ceux de la dépression. Et pour cause: près de 70% des personnes qui se suicident souffrent de cette pathologie.
Accumuler les facteurs de risque
Les signaux d’alerte doivent être mis en perspective avec les facteurs de risque. La dépression donc, mais aussi des données comme l’âge -chez les 24-35 ans, le suicide constitue la première cause de mortalité-, le sexe -3/4 des passages à l’acte concernent les hommes-, les conduites addictives, l’isolement social, les troubles psychiatriques…
“On peut dire que quelqu’un présente des risques suicidaires lorsqu’il cumule au moins cinq facteurs de risque”, estime Magalie Gavend. L’accès aux moyens de se tuer, comme posséder une arme dans le cadre de sa profession ou bien le fait de faire partie d’une famille déjà endeuillée par un suicide doivent aussi être pris en compte.
Dire son inquiétude
Survient alors la délicate étape de l’ouverture d’un dialogue. Comment parler de ses craintes à un proche, et encore plus un quelqu’un qui l’est moins, comme un voisin ou un collègue de travail? “En lui disant ‘je suis inquiet'”, rétorque Magalie Gavend. Tout simplement. Entendre la souffrance de l’autre et “lui montrer que sa vie nous importe”, complète Michel Debout, président fondateur de l’Union nationale de la prévention du suicide (UNPS). Une approche en douceur, qui permet de “préparer le terrain” et d’éviter le violent “tu devrais voir un psy”. Un terme à proscrire, pour ne pas braquer. Mieux vaut, dans un second temps, proposer à son ami ou collègue de parler à “professionnel de l’écoute”, qui peut tout aussi bien être un bénévole, et lui transmettre les coordonnées d’une des associations joignables 7jours/7 (voir encadré). Alerter le reste de l’entourage peut aussi s’avérer utile: “il peut s’agir de l’assistante de vie pour une personne âgée ou du médecin scolaire pour un adolescent”, détaille Françoise Facy, l’actuelle présidente de l’UNPS.
Associations joignables 7jours/7
Suicide Ecoute. 01 45 39 40 00 (24h/24)
SOS Suicide Phénix. 0825 120 364 (16h-23h) et au 01 40 44 46 45 (de 12h à 00h)
Ecouter, alerter et accompagner: la mission de l’entourage doit d’arrêter là. “Il ne s’agit pas de se transformer en psy à la petite semaine”, avertit le professeur Debout. De toute façon, “le proche ne peut rien proposer d’autre”, tranche la psychologue Magalie Gavend. On ne peut pas sauver quelqu’un contre sa volonté”. Mais juste faire un premier pas, capital.
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